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Lettre ouverte à Christophe Gallaz

Concerne : chronique « Portrait du motard en symptôme »



Cher Christophe,


Référence est faite à la chronique citée en marge, en tant que président de la plus grande association de motocyclistes de Suisse romande, il m’a paru loisible de répondre à votre morceau d’anthologie journalistique déjantée.


Quel ne fut pas mon désarroi ce matin… Comprenez bien, lorsque j’ai éteint mon réveil sur mon natel, une notification accompagnait ce dernier, d’un ami qui me faisait passer votre rageux billet. Comme première lecture, je vous garantis que j’ai pensé des mots que notre éducation réciproque ne nous permettrait pas d’écrire… Christophe, enfin, pourquoi nous détestez-vous tant ? J’aimerais comprendre, sincèrement, car un tel déversement de haine est triste et vous devez être vraiment malheureux pour haïr à ce point toute une communauté que vous ne connaissez visiblement pas le moins du monde



Christophe, il me paraît important de revenir sur les points que votre haine vous oblige à alléguer.


D’entrée Christophe, sans même travailler une quelconque entrée en matière, vous frappez et vous frappez fort ! Vous parlez de « motards primaires » qui « pètent au long des rues en jouissant de le faire »… Mmmh, il y a là une promesse ! Nous autres, motards, serions sujets aux flatulences intestinales et prendrions plaisir à les laisser s’échapper au bord des rues afin d’incommoder le bourgeois… Tout un programme ! Je serais fort intéressé que vous documentiez un peu vos affirmations, serait-ce la vibration du moteur qui stimulerait la fabrication de méthane dans l’estomac ? Franchement Christophe, je suis vraiment intrigué, si ce que vous dites est vrai, il y a une question sanitaire qui doit être soulevée et vite. Ou peut-être que ce n’est qu’une insulte gratuite… Je n’ose y croire ! Un homme qui manie si bien le verbe que vous ne peut s’abaisser à insulter gratuitement les gens, votre intellect vous place bien au-dessus de cela ! Je ne m’étendrai pas sur le motard primaire, je vous demanderai simplement s’il existe des motards secondaires ? Peut-être les usagers de vélos électriques ?


Vous nous prêtez ensuite des ambitions de chevaucheurs « d’aurochs d’avant l’histoire ». Quelle figure de style médiocre ! Franchement, vous pouvez faire mieux. Premièrement, on ne dit pas « avant l’histoire » mais préhistorique… Ajouter des mots inutiles ne fait que démontrer le vide sidéral de votre propos… Enfin, il est utile de rappeler que le dernier auroch est mort en 1620… On est loin de la préhistoire et vous me décevez, on ne voit de telles erreurs de date que dans les téléréalités du type « Les Anges »…


Vous nous dites consanguins… Intéressant… Une des conséquences de la consanguinité est la dégénérescence… Christophe, vous vous réclamez d’une certaine intellectualité et d’un certain savoir qui vous autorise même, rappelons-le à nos lecteurs, à remettre en boîte des aventuriers de notre temps comme Bertrand Picard. Avec un tel aplomb, je pense que vous devez, lors de vos rêves solitaires, vous imaginer à Florence aux alentours de 1480 (quand il y avait encore des aurochs tient), aux côtés de De Vinci et Botticelli et financé par Laurent le Magnifique pour vos talents d’auteur. Quel beau rêve, non ? Oui mais c’est sans doute là que nous voyons votre dégénérescence ! En d’autres temps, les intellectuels se sont battus à l’aide du verbe pour les libertés, la démocratie, l’humanisme, le respect de l’autre… Christophe, vous, vous vous servez du verbe pour tenter, bien maladroitement, d’ostraciser une partie de la population… Tout adepte de Mendel conclurait immanquablement à un appauvrissement génétique… Christophe, je suis bien trop pauvre culturellement pour conclure quoi que ce soit mais je vous laisse y réfléchir, pour autant que vous en soyez capable.


Votre texte enchaîne ensuite sur un reproche d’une tristesse, mais d’une tristesse Christophe ! J’ai presque versé une larme pour vous tant cela m’a touché qu’un humain puisse écrire cela. Vous vous indignez car nous autres motards, nous nous saluons… Christophe, vous vous êtes relu avant de publier votre Guernica ? Dans une société de plus en plus individualiste, où les gens ne pensent plus qu’à eux, vous reprochez à des gens de se saluer ? Personnellement Christophe, mes parents aimants et sans liens de parenté entre eux, m’ont appris à dire bonjour aux gens… Malheureusement, les motards primaires sont les seuls qui répondent sur la route…


Christophe, vous avez écrit tout cela car vous n’êtes pas content du fait que nous ayons (je dis « nous » car j’y étais, mais ça vous l’aviez compris) usé de notre droit constitutionnel de manifester notre désaccord avec une politique qui viole, l’ignorez-vous, une autre garantie constitutionnelle qu’est le libre choix du moyen de transport. Christophe, sérieusement, vous nous reprochez de faire fonctionner la démocratie ? Il est urgent de consulter ! En plus, personne, lors de cette manifestation n’était contre les vélos ! Personne ! Nous l’avons dit, nous l’avons écrit et nous le revendiquons encore, nous ne demandons non pas une suppression des pistes faites mais bien simplement une réduction de leur largeur à une taille adaptée à leur usage… Mon Dieu quel crime !!!


Plus grave et c’est là mon cher Christophe, que vous partez littéralement en vrille. Vous vous comportez là comme un dinosaure réactionnaire du monde d’avant… Vous parlez d’irrévérence écologique… Quelle méconnaissance du monde, du progrès et des avancées technologiques… D’ici 10 ou 15 ans, cet argument stupide qui n’a d’autre dessein pour les léninistes et autres « forces populaires » dont vous semblez dangereusement nostalgique, de restreindre les libertés individuelles, n’aura plus lieu d’être. Vous avez non pas un mais vingt trains de retard, le monde change mon cher, vous feriez bien de vous adapter.


Mais en réalité, vous êtes un totalitariste frustré, c’est certain ! Pour preuve, le fait que nous ayons usé de notre droit constitutionnel de manifester vous est insupportable. La liberté vous est insupportable. Le fait que nous pensions différemment de vous, vous est insupportable. Le fait que nous soyons les porte-drapeaux d’un mode de vie solidaire et basé sur des amitiés sincères que vous ne connaîtrez jamais vous est insupportable. Le fait que lorsque l’un des nôtres tombe, nous l’aidons à se relever et que lorsque vous tomberez, vous serez seul, vous est insupportable… Les gens simplement plus agréables que vous, vous sont insupportables… Et l’écologie, vous n’en avez cure ! Vous ne dégommeriez jamais un homme comme Bertrand Picard s’il en était autrement…


Christophe, en fait, vous êtes jaloux… Je vais stopper ici les remarques sur votre magnifique fable qui ferait passer La Fontaine pour un enfant de 4 ans et me contenter de vous posez quelques questions…


Combien de fois, au cours des 10 dernières années, avez-vous tendu la main à des gens dans le besoin ?

  • Nous les motards primaires, chaque année, à Genève, nous nous réunissons pour récolter des fonds pour la défense du droit des femmes (Toutes en Moto).

  • Nous les motards primaires, nous nous réunissions chaque année pour récolter des jouets pour les enfants malades (Toy Run, Rouler pour un sourire).

  • Nous les motards primaires, nous soutenons activement le don d’organe.

  • Nous les motards primaires, nous récoltons de la nourriture et des fonds pour les sans abris (G2M pour Passons à l’action).

  • Pendant la crise du Covid-19, lorsque que les cyclistes qui vous sont chers, manifestaient tel un troupeau de moutons écervelés en défiant toutes les mesures sanitaires impératives à sauver des vies, nous, les motards primaires, livrions des courses aux personnes qui ne pouvaient pas aller en faire (qu’ils soient malades, à risque ou simplement car ils avaient des horaires qui ne le permettaient pas).

Tout cela Christophe, vous ne pouviez que l’ignorer tant vos préjugés sont aveuglants et parce que, comme le pire des racistes imbéciles, vous êtes incapable d’aller au-delà des apparences. Comme tout simpliste, votre suffisance vous pousse à haïr tous ce que vous ne connaissez ou ne comprenez pas.


Mon cher Christophe, pour peu que vous lisiez ces lignes, ce dont je doute, je ne suis qu’un gueux motorisé finalement, je tiens à ce que vous sachiez que je n’ai point de haine pour vous. Je tiens à ce que vous sachiez que je n’ai aucune colère ni aucune rancune, non mon cher Christophe, je n’ai que tristesse et empathie. Je plains la personne seule que vous êtes et qui ne doit avoir que des relations circonstancielles. Je préfère mille fois ma vie de motard primaire consanguin entouré de gens sur qui je peux compter qu’une vie de faux érudit dont la solitude sociale n’a d’égale que la solitude de Pluton…


Mon cher Christophe, vous n’êtes pas le premier à qui je réponds par suite d’écrits hasardeux. J’ai pour habitude d’inviter les journalistes qui se sont laisser aller à des errements, à un de nos événements, histoire qu’ils voient les choses en vrai. Mais vous n’êtes pas journaliste, votre texte n’est pas un article, tout au plus une lettre d’insultes sans respect. Je ne le ferai donc pas. En revanche, ce que je peux vous promettre, c’est que dans deux ou trois ans, quand la sénilité morbide dont vous semblez souffrir aura pris le dessus et qu’au vu de votre inadaptation sociale, vos proches vous auront parqué tel un auroch d’avant l’histoire dans un EMS, c’est la chose suivante. Mes amis motards primaires et moi, au moment d’organiser une distribution de chocolat pour nos ainés, nous veillerons à ce que vous receviez votre plaque pour Noël ! En effet, mon cher Christophe, malgré la méchanceté dont vous avez fait preuve à notre égard, nous nous refusons à devenir comme vous. Aussi lorsque nous aiderons notre prochain, comme nous le faisons souvent, nous vous aiderons aussi, soyez tranquille. Nous ne vous rappellerons pas votre texte, nous n’en parlerons pas et nous n’attendrons aucune excuse.


En espérant que les présentes lignes retiendront votre meilleure attention, je vous adresse, cher Christophe, l’assurance de mon adéquate considération.

Aristos MARCOU

Président Generation2Motards

EDIT: Réponse de Monsieur Gallaz:

Mon cher Aristos,

Ne vous étonnez pas que je fasse suite par cette réponse volontairement « ouverte » à votre Lettre éponyme parue sur ce site à mon adresse : il arrive que les polémiques fassent mûrir les esprits. Je règle quelques points. D’abord je ne suis guère mobilisé par la haine, mais par une évidence dont tout citoyen démocrate devrait s’alarmer jusqu’au sein de votre PLR genevois : en ville au moins, le motard, ou plus généralement le conducteur d’un deux-roues, est une calamité pour les passants comme pour les riverains. Il assourdit les lieux plus que tout autre élément du trafic motorisé, en pollue l’atmosphère dans des proportions impériales, et se distingue souvent par le mépris qu’il porte à ses concitoyens accablés par ses pétarades volontairement forcées — celles-là mêmes dont vous insinuez subtilement que je leur assignerais une provenance intestinale.

Je ne doute pas que ces circonstances vous sont parfaitement connues, mon cher Aristos, comme elles le sont de quelques-uns de vos confrères à motocyclette ayant reconnu ces jours passés, entre autres sur Facebook, la pertinence de tel passage de ma chronique. Tenez, celui-ci sur Facebook, que vous retrouverez sans difficulté : « Motard depuis 43 ans, ai toujours eu des pots réglos, puis sur circuit les spéciaux faisaient 105 DB… sans protection auriculaire c’était l’enfer. Sur route, suivre une moto sans DB Killer c’est usant, puis finalement tu vas devant pour respirer et revivre. Je ne comprends pas pourquoi on a laissé homologuer des divas italiennes, US ou allemandes qui vrombissent, pétaradent, avec des pots “ légaux ”. Et lorsque je ne roule pas, j’entends passer quelques enragés (suis à l’entrée d’un village) qui ne coupent que 150 m plus loin. Infernal, je comprends finalement l’exaspération de citoyens excédés par ces décibels débiles, par cet irrespect de l’autre (…) ». Vous convient-ce?

Je ne doute pas non plus que vous ayez lu les articles de presse ayant évoqué le sujet, de-ci de-là ces dernières années, y compris sur le mode de la critique ou de l’alarme. Au point que la conseillère nationale alémanique Gabriela Suter a déjà glissé dans les tuyaux parlementaires une initiative parlementaire visant l’interdiction des motos les plus bruyantes sous nos latitudes confédérées.

Ce qui me sidère au fond, c’est la réaction machinalement agressive du microcosme motocycliste à l’endroit de quiconque rappelle au public les libertés volontiers débordantes qu’il s’octroie. J’avais pourtant pris soin, dans ma chronique, de prendre pour sujet prioritaire les « motards primaires » expressément distingués comme tels. Il est intéressant qu’une belle proportion de vos confrères sur bécane s’y soit associée… Voilà qui me donne à méditer sur nos congénères obsédés de tribalisations exclusives, cher Aristos, plaisir intellectuel que je poursuivrai vaille que vaille jusqu’à la dégustation du chocolat que vous me promettez en gentilhomme au temps de mes vieux jours — quand vous aurez rejoint, de votre côté, celui d’une maturité réflexive distanciée. Portez-vous bien d’ici là.

C. Gz

Chronique de Christophe Gallaz

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